Femme pasteur ?

Aujourd’hui nous allons aborder un sujet pas très facile à traiter, un sujet sensible, un thème qui a fait couler beaucoup, beaucoup d’encre et de paroles depuis des générations. Un débat qui a tellement divisé les églises d’hier et d’aujourd’hui. Il s’agit de la place de la femme dans l’église, de son accès à l’enseignement et aux fonctions pastorales.

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Allez, hommes et femmes faites de toutes les nations des disciples, hommes et femmes, les baptisant, hommes et femmes, au nom du père du fils du saint-esprit, et enseignez leur, hommes et femmes, à observer tout ce que je vous ai prescrit.

Retranscription de l’épisode

Alain Glibert :

[00:00:00] Bonjour à toutes et à tous. Bienvenue dans l’émission Réussir Ma Vie, une émission qui vous montre comment ne pas la gâcher en répondant à vos questions sur Dieu, sur la foi, sur la vie. Je m’appelle Alain, je suis théologien et membre de l’équipe pastorale de mon église. Nous allons aborder aujourd’hui un sujet pas très facile à traiter, un sujet sensible, un thème qui a fait couler beaucoup, beaucoup d’encre et de paroles depuis des générations. Un débat qui a tellement divisé les églises d’hier et d’aujourd’hui. Il s’agit de la place de la femme dans l’église, de son accès à l’enseignement et aux fonctions pastorales.

Plusieurs collègues pasteurs et moi-même nous sommes penchés très sérieusement sur la question, puisqu’ interrogés de nombreuses fois à ce sujet par plusieurs membres de notre communauté, alors je vous livre ici le résultat de nos différentes [00:01:00] analyses et réflexions basées sur une exégèse biblique que nous avons voulu rigoureuse. Elle n’a pas la prétention de clore le débat ou de faire force de loi de manière générale, elle est le reflet de notre position dans l’état actuel de notre compréhension. Je souhaite préciser avoir été remis moi même sérieusement en question puisque je suis issu d’un milieu chrétien assez froid et rigide à ce sujet. Alors de plus en plus de dénominations protestantes acceptent des femmes comme pasteurs. S’agit-il d’un effet de mode, d’un désir un peu féministe voulant revaloriser le statut de la femme dans l’église au même titre que dans la société ? S’agit-il d’une position réactionnaire face au système religieux de type patriarcal ayant, il faut le dire, brimé la femme pendant des siècles ? S’agit-il de propositions théologiques voulant suivre le courant, [00:02:00] se voulant plus moderne et adapté à la réalité de la société dans laquelle nous vivons aujourd’hui voulant assurer la parité homme femme dans tous les domaines de la vie ? Ou alors s’agit-il d’une saine compréhension biblique cohérente donnant aux soeurs la possibilité de s’épanouir dans les ministères dont elles ont été privées durant des siècles par une société ecclésia et civile clairement patriarcale ?

Nous précisons d’emblée qu’il ne s’agit pas du tout ici de mettre en question l’égalité homme femme en matière de capacité intellectuelle, de discernement, de sagesse ou de don spirituel en général, nous sommes convaincus que ces qualités ne sont pas du tout une prérogative masculine et nous ne voulons pas non plus nous retrancher derrière des “On a toujours pensé ça, on a toujours dit ça, on a toujours fait comme ça “.

Alors le premier point qu’il nous faut clarifier est la [00:03:00] prise de parole des femmes dans le cadre des réunions de l’Église, et plus précisément lors des cultes. Voici les passages cités habituellement pour interdire aux femmes de prêcher dans les églises. Un texte bien connu dans la première lettre de Paul aux Corinthiens, 14 verset 34 qui nous dit ceci : Que vos femmes se taisent dans les assemblées car il ne leur est pas permis de parler mais qu’elles soient soumises, comme le dit aussi la loi, et si elles veulent apprendre quelque chose, qu’elles interrogent leur propre mari chez elles car il est honteux pour une femme de parler dans l’assemblée.

L’analyse contextuelle rapide nous permet de comprendre que Paul ne s’adresse absolument pas ici à des femmes qui prêchent ou qui enseignent, mais bien plutôt aux maris. Littéralement il s’agit bien de VOS femmes, du grec mon et [00:04:00] non que LES femmes, comme c’est le plus souvent traduit. Donc Paul s’adresse aux maris de certaines qui semblent poser des questions intempestives à haute voix, ce qui occasionnait sans doute dans l’église un sérieux désordre. Et dès lors, l’apôtre Paul les encourage à poser leurs questions, non dans le cadre de réunions d’église, cultes ou autre, mais bien plutôt à leur mari à la maison. Vous savez, lors des cultes de l’église primitive, calqué dans ses formes, sur la synagogue, les femmes et les hommes étaient séparés. Alors imaginez un instant la cacophonie produite par des femmes qui se mettent à interpeller leur mari dans une autre section de l’église. Très honnêtement, je pense que nous ne pouvons pas nous baser sur ce passage pour justifier de manière générale la privation de parole des femmes dans le cadre d’un service de l’église locale.

Dans cette même lettre, l’apôtre Paul nous dit ceci, [00:05:00] on est toujours dans 1 Corinthiens 11:5 : Toute femme qui prie ou qui prophétise la tête découverte déshonore sa tête ou son chef, car c’est la même chose qu’une femme qui serait rasée. L’apôtre apporte lui-même le sens qu’il donne au terme prophétie. 1 Corinthien 14:3, Paul nous dit : Celui qui prophétise au contraire, parle aux hommes, les édifie, les exhorte, les console. Il nous semble impossible d’édifier, d’exhorter, de consoler en silence, sans enseigner. Alors si Paul dit que la femme prophétise, il nous semble cohérent de comprendre qu’elle puisse enseigner aussi.

Pourtant, la lettre écrite par Paul à Timothée semble nous enseigner le contraire. Dans 1 Timothée 2:11, il nous dit : Que la femme s’instruise paisiblement dans [00:06:00] une entière soumission. Je ne lui permet pas d’enseigner et de dominer sur l’homme, mais je lui demande de garder une attitude paisible.

Alors on peut se poser la question. L’apôtre Paul est-il incohérent, contradictoire ? Cela me semble évidemment très très peu probable. Le problème soulevé à Éphèse devait donc avoir un contexte particulier et concernait peut-être des femmes qui enseignaient de fausses doctrines et entraînaient les hommes dans le péché, comme Jésus le mentionne dans sa lettre à l’église de Thyatire, où la prophétesse Jezabel enseignait bel et bien dans cette église. On lit ce texte dans Le Livre de l’Apocalypse 2:20 : Mais ce que j’ai contre toi c’est que tu laisses la femme Jezabel qui se dit prophétesse, enseigner et séduire mes serviteurs pour qu’ils se livrent à l’impudicité et qu’ils mangent des viandes sacrifiées aux idoles. [00:07:00] Je lui ai donné du temps afin qu’elle se repentit et elle ne veut pas se repentir de son impudicité.

Remarquons d’emblée que ce qui est reproché à Jezabel dans ce passage, ce n’est pas le fait d’enseigner mais d’être une prophétesse autoproclamée qui encourage les membres de l’Église à l’impudicité et à la consommation des viandes sacrifiées aux idoles. Une contextualisation plus pointue encore permet de comprendre que Paul mettait certainement en garde les Ephésiens dont Timothée était le pasteur, contre les gnostiques qui prêchaient que la connaissance venait en fait de la femme. Ceci enseignait que c’était Adam qui avait été séduit dans le jardin d’Éden. Et puis il y avait aussi à Éphèse un groupe qui vouait un culte à la déesse Diane, déesse grecque importante mentionnée au chapitre 19 du [00:08:00] livre des Actes et certaines de ces femmes prêtresses se joignaient aux chrétiens pour enseigner de fausses doctrines pendant la journée et étaient des prostituées sacrées pendant la nuit. Vous savez, il faut toujours interpréter la parole à la lumière de toute la Parole. Paul n’aurait pas pu affirmer comme une généralité que la femme n’avait pas le droit d’enseigner ou même parler dans l’église alors que lui-même côtoyait et approuvait des femmes dans le ministère qui priaient, prophétisaient et enseignaient.

Un autre texte déterminant en faveur d’un ministère de l’Enseignement accordé bibliquement aux soeurs comme aux frères, est celui-ci. Il s’agit ni plus ni moins du grand ordre missionnaire donné par Jésus à tous ses disciples, hommes et femmes. Mathieu 28:19-20 : Allez, hommes et femmes faites de [00:09:00] toutes les nations des disciples, hommes et femmes, les baptisant, hommes et femmes, au nom du père du fils du saint-esprit, et enseignez leur, hommes et femmes, à observer tout ce que je vous ai prescrit. Sur ces différentes bases et sur la compréhension que nous en avons, il semble que l’interdiction faite aux soeurs de prendre la parole ou d’enseigner dans l’église ne soit pas aussi défendable bibliquement que cela pourrait paraître en première lecture. Le point le plus sensible souligné par Paul dans 1 Timothée 2:11 que nous avons lu, reste la notion de prise d’autorité qui serait liée à l’enseignement. L’acte pour une femme d’enseigner ou de prêcher doit-il être considéré systématiquement comme prise d’autorité sur les membres de l’Église ? Il nous semble que dans la mesure où ce service [00:10:00] correspond à un appel, aux dons et capacités spirituel liés à l’exercice occasionnel ou régulier de ce ministère, et que celui-ci soit exercé sous l’autorité du pasteur ou du conseil pastoral, le problème ne se pose absolument pas. Il n’y a pas dans ce cas prise personnelle d’autorité, mais il y a délégation.

Nous ne pouvons quand même pas passer sous silence la prudence liée à l’énorme responsabilité de l’exercice de l’enseignement. Jacques nous dit ceci au verset 1 du chapitre 3 de son épître : Mes frères, qu’il n’y ait pas parmi vous un grand nombre de personnes qui se mettent à enseigner car vous savez que nous serons jugés plus sévèrement.

Cela dit, quid du ministère pastoral féminin ? D’emblée, il faut souligner que si les anciens pasteurs doivent obligatoirement avoir, [00:11:00] contrairement au diacre, la capacité d’enseigner tout prédicateur n’est pas forcément pasteur. Et tout pasteur n’exerce pas systématiquement un ministère régulier de prédication. La fonction pastorale va bien au delà de la prédication. Les pasteurs sont avant tout des bergers qui prennent soin des membres de l’Église, capables d’accompagner, d’écouter, de conseiller, d’encourager et à ce titre, il est évident que bien des soeurs sont pourvues comme les hommes de ces dons spirituels et de ces capacités. Il est clair que dans la parole de Dieu les femmes peuvent exercer différents ministères au même titre que les hommes. Paul a établi plusieurs femmes dans le ministère et dans des fonctions importantes dans l’église qu’il a fondée, je pense à Pricille, Evodie, Syntiche, et vous savez, en grec, le titre ancien qui est utilisé pour parler des personnes ayant eu l’autorité spirituelle dans [00:12:00] l’église, en grec, se dit “presbuteros”, le terme “ancien”. Et ce terme est bibliquement l’équivalent de pasteur ou d’évêque. Il est remarquable que ce titre existe aussi au féminin dans Le Nouveau Testament : presbuteras. On trouve ce terme dans 1 Timothée 5:2 et il est traduit par femmes âgées. Mais il pourrait tout aussi bien être traduit par “anciennes”. C’est le même terme qu’ancien, mais au féminin. Les anciens chez les juifs, comme les anciens de l’Église étaient naturellement choisis parmi les plus expérimentés dans la foi, les plus âgés dans le Seigneur, chez les hommes et semble-t-il également chez les femmes. Ces femmes avaient pour vocation essentielle de prendre soin et d’instruire les jeunes femmes dans leur rôle d’épouse et de mère de [00:13:00] famille. Paul l’enseigne dans son épitre à Tite 2:2. Alors, à la lumière de ces différents textes et selon la compréhension actuelle que nous en avons, nous pensons que nous priver des dons spirituels, des appels, de la sensibilité féminine et des capacités de certaines soeurs ne peut bibliquement se justifier dans le cadre d’un conseil pastoral. Ce conseil ne pourrait qu’être enrichi par la présence de soeurs appelées par Dieu et présentant les qualités humaines et spirituelles nécessaires. Cela rendrait certainement le suivi des soeurs dans l’église, incontestablement plus facile et plus efficace. Il nous apparaît cependant sage en raison de 1 Timothée 2:12 et 14, que ses soeurs s’abstiennent de prendre l’initiative d’exercer de manière individuelle et privée l’autorité spirituelle [00:14:00] sur les hommes. Dans le même ordre d’idées, la fonction de pasteur principal ne nous semble pas non plus vraiment défendable. Alors, à la lumière de ces réflexions, nous ne pensons donc pas déroger à l’enseignement biblique en accordant aux soeurs qui en ont reçu l’appel, les dons spirituels et les capacités, la possibilité d’exercer un ministère d’enseignement et d’avoir accès à la fonction pastorale dans le cadre spécifique que nous venons de développer.

C’était Alain pour Réussir Ma Vie. Ne ratez pas notre prochain podcast. Je vous souhaite bonne réflexion. Que le Seigneur vous éclaire et vous bénisse abondamment.

Références

1 Corinthiens 14:34
Que vos femmes se taisent dans les assemblées car il ne leur est pas permis de parler mais qu’elles soient soumises, comme le dit aussi la loi, et si elles veulent apprendre quelque chose, qu’elles interrogent leur propre mari chez elles car il est honteux pour une femme de parler dans l’assemblée.

1 Corinthiens 11:5
Toute femme qui prie ou qui prophétise la tête découverte déshonore sa tête ou son chef, car c’est la même chose qu’une femme qui serait rasée.

1 Corinthien 14:3
Celui qui prophétise au contraire, parle aux hommes, les édifie, les exhorte, les console.

1 Timothée 2:11
Que la femme s’instruise paisiblement dans une entière soumission. Je ne lui permet pas d’enseigner et de dominer sur l’homme, mais je lui demande de garder une attitude paisible.

Apocalypse 2:20
Mais ce que j’ai contre toi c’est que tu laisses la femme Jezabel qui se dit prophétesse, enseigner et séduire mes serviteurs pour qu’ils se livrent à l’impudicité et qu’ils mangent des viandes sacrifiées aux idoles. Je lui ai donné du temps afin qu’elle se repentit et elle ne veut pas se repentir de son impudicité.

Mathieu 28:19-20
Allez donc dans le monde entier, faites des disciples parmi tous les peuples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit et enseignez-leur à obéir à tout ce que je vous ai prescrit. Et voici : je suis moi-même avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde.

Jacques 1:3
Mes frères, qu’il n’y ait pas parmi vous un grand nombre de personnes qui se mettent à enseigner car vous savez que nous serons jugés plus sévèrement.

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